LE PÈLERINAGE ISLAMO-CHRETIEN DES « SEPT SAINTS » (suite)
Chaque année, il attire un bon nombre de personnes, croyantes ou pas, toute personne dont l’humanisme incite à construire un monde plus juste, un monde de paix… En ce 70ème anniversaire, le peuple a déferlé aux sept saints le 28 juillet 2024. En ce lieu symbolique du vivre pacifique des différences reconnues, trois célébrations se succèdent le matin.
C’est d’abord la célébration chrétienne, temps de la prière. Bien avant l’heure, la chapelle bruisse des multiples saluts de reconnaissance… (les musulmans y ont une place réservée) ; mais le silence s’impose lorsque la chorale entonne le chant d’entrée. Prêtres et diacres précèdent les deux évêques : Mgr Denis Moutel et le Cardinal Cristobal Lopez… Ils sont nombreux, au dehors, à suivre la célébration ! Une messe ordinaire au cours de laquelle la parole forte du Cardinal retentit devant un auditoire particulièrement attentif. Commentant le geste du partage du pain et du poisson de l’Évangile de Jean, il nous invite à partager ce que nous avons, ce que nous vivons, ce que nous sommes… et Dieu fera le reste pour qu’advienne son Royaume… Il attire notre attention sur le signe de la cloche, qui vient d’Alger… (longue histoire !) et qui appelle chrétiens et musulmans à la prière… et à l’unité… Enfin, il nous invite à l’engagement du dialogue : dialogue de la vie fait des rencontres du quotidien, de convivialité, de respect et d’entraide ; collaborations au service des grandes causes de l’humanité, collaborations qui sont des moyens naturels de meilleure connaissance et appréciation mutuelle… et, si possible, engager le dialogue de notre expérience de foi. Vaste programme…
Puis nous nous dirigeons vers la fontaine en faisant halte autour de la stèle de granit qui porte le mot « PAIX », gravé en français, en breton et en arabe. Ce deuxième temps est celui d’une écoute réflexive d’un texte poétique émis par un participant au nom de ceux qui ne se reconnaissent pas croyants. Nous écoutons très silencieusement et respectueusement ce texte qui valorise le vivre ensemble dans la liberté, la tolérance et la paix à construire… Et les applaudissements signent l’approbation de la foule…
Il nous faut monter pour vivre la dernière étape de cette triple célébration… par un sentier malaisé qui nous conduit à la fontaine. Là, c’est au tour de nos amis musulmans de prendre la parole. La communauté musulmane de Lannion, avec son imam, est bien représentée, entourée cette année d’une vingtaine de scouts musulmans de France qui campent aux alentours. La sourate 18 est magnifiquement psalmodiée. Je suis toujours frappée par l’intense recueillement des musulmans qui écoutent dévotement cette psalmodie : une parole qui leur vient d’Ailleurs… Dans son court commentaire d’un verset qu’il retient, l’imam nous invite à prendre refuge dans notre grotte intérieure pour y renouveler notre relation à Dieu et aux autres…
Mais cette année, le moment le plus éloquent et émouvant, c’est à mon sens le geste du cardinal Lopez : le chant de la sourate à peine terminé, il s’en va embrasser l’imam et les adultes qui l’accompagnaient ! Un geste plus fort que les discours !
Et c’est l’invitation cordiale à l’apéritif par les musulmans : à côté, sur deux tables, lait et dattes nous attendent… avant d’aller se restaurer sous les barnums où s’agitent de nombreux bénévoles et faire de nouvelles rencontres…
Sr Armandine Bagot, FSE – Trégueux